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Yves Gerbal (1959-)
Haïkus de Provence

Ciel d'été
Pas assez de place
Pour toutes les étoiles

L'insoutenable légèreté
Des robes
L'été

Il soulève toutes les jupes
Le mistral
Est un aveugle farceur

Entre la jupe
Et le tee-shirt
Son nombril me regarde

Pendant l'amour
Le chant des cigales
Et après aussi

Après la pluie
Même les ombres
Sont plus propres

En regardant la fille
De l'affiche
Presque un accident

Sous les platanes
Un autre monde
L'ombre

Seul sur la plage
Dans mon coeur aussi
Un bruit de vague

Minuit
Sur la plage
Le monde rien que pour moi

Dans le vent
Les chaises longues
Se prennent pour des voiles

Tout en travaillant
L'abeille se parfume
A la lavande

Le vent
Lave plus blanc
Les rochers

Au-dessus des poissonnières
Les oiseaux blancs
Se plaignent

Tout s‘agite
Dans le vent
Mais rien ne change

C'est la nuit
Mais
Les vagues no dorment jamais

Dans la tranche de melon
J'ai laissé
La trace de mes dents

Au milieu des vignes
Une cabane en pierres
Vide

Elles fleurissent
C'est la saison
Des lunettes noires

Erreur fatale
Il a pissé
Face au mistral

Qui la fait rire
La fille au téléphone
Un si beau cul !

 L'enfant jouait dehors
Maintenant son nez froid
Contre ma joue

 Bien à l'abri
L'escargot
Regarde la pluie

 Le mistral
Se régale
Entre leurs cuisses

La marque blanche des bretelles
Sur la peau
Rouge

Le lézard est passé
Sur le mur
De l'ombre à la lumière

 La plus haute branche
De l'arbre le plus haut
Une pie

Par-dessus les tribunes
Le soleil se couche
J'ai loupé le but

Rien ne résiste
Au vent
À part les goélands

Silence dans l'arène
Le taureau
Se fait attendre

À la sortie du virage
La mer
Inonde le pare-brise

L'amour est plus doux
À l'abri
Des persiennes

Le coeur de l'été
Qui bat en moi
Encore une fois

Elle lit
Les seins nus
Je la regarde

Les voiles affalées
Sont des robes tombées
Je rêve

Même les pierres
Ont brûlé
Même les pierres

Trop courte, trop longue
Jamais la bonne longueur
Mon ombre

La belle pharmacienne
Remplit le distributeur
De préservatifs

Qu'est-ce qui m'a pris ?
Entre deux portes
Ce baiser

Je mords à pleines dents
Mon sandwich en revenant
De l'enterrement

Dans l'isoloir
Juste au moment de voter
Je fais un pet

Premier jour de l'an
La même tête qu'hier
Dans le grand miroir

Dans la piscine
Déjà
Des feuilles mortes

 Il a chanté toute la nuit
Cet oiseau a bien mérité
Un haïku

Le ciel la mer le vent
Eux aussi
Ont l'accent

La ville a chaud
Attention
Les seins trouent les tee-shirts

Le ciel
Monochrome
Bleu

Vague à l'âme
Je noie mon chagrin
Dans l'huile d'olive

Sur ce caillou
Combien de fois ai-je posé
Le pied

Un glaçon
Seulement un glaçon
Et pourtant, et pourtant

Les pieds dans la cendre
Je pleure
Les arbres disparus

Une langue étrangère
Sur le cadran solaire
Sine sole nihil sum

J'ai découvert
La règle d'or
Humer la lumière

Ah! Prendre la route
Encore une fois
Vers la Sainte-Victoire

La Sainte-Victoire
Ressemble
Au Fuji-Yama

L'ombre du bambou
Bouge sur ma main
Celle qui n'écrit pas

Dehors l'orage gronde
Dedans
Les enfants dorment

Encore elle
Sur les toits et les poubelles
La mouette qui ricane

 

Gerbal, Yves: Haïkus de Provence; ill., Stéphan Muntaner, Marseille: Autres temps; Fondation Regards de Provence, 1999, 62 p. [111 haïkus avec un préambule intitulé: "Zen à la provençale"]

Gerbal, Yves: Haïkus de Provence, autres saisons; ill., Stéphan Muntaner, Marseille: Autres temps; Fondation Regards de Provence, 2001, 63 p. [111 haïkus avec un préambule intitulé: "Petit manuel pour poésie minuscule"]

 

http://haiku.provence.pagesperso-orange.fr/
http://575.tempslibres.org/aphp/page3.php?page=v02n1p32
http://noosphere2.chez.com/COURT.HTM#4